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Il me semble utile de rappeler que le Yoga est avant tout une philosophie. Bien souvent, les personnes qui veulent pratiquer le Yoga cherchent à apprendre des techniques de bien être, ou à faire une gymnastique de remise en forme.
Le Yoga n’est pas cela, même s’il permet évidemment de se sentir mieux dans son corps et dans sa tête ! 😉
Le Yoga est une voie de transformation puissante issue de différentes traditions philosophiques indiennes plurimillénaires. On eut dire qu’il est le résultat de 4.000 ans de transformation.Mon article est très général et ne prétend absolument pas faire le tour de cette vaste question ! Mon intention est de clarifier certains point qui me semblent indispensables de connaître quand on s’intéresse tant soit peu au Yoga et à la spiritualité.
Je me réfère pour cet article au livre de Mircea Eliade, Yoga, dont je publie ici des extraits.
– L’histoire de la philosophie indienne :
> Pour comprendre le Yoga, il est important de connaître les grandes lignes de l’histoire de la philosophie indienne qui repose sur quatre principes fondamentaux : le Karman, la Maya, le Nirvana/l’Atman et le Yoga.
- Le Karman : C’est la loi de la causalité universelle qui solidarise l’homme avec le Cosmos et le condamne à transmigrer indéfiniment.
- La Maya : C’est l’illusion cosmique, ce processus mystérieux qui engendre et soutient le Cosmos ; la Maya est supportée par l’homme aussi longtemps qu’il est aveuglé par « avidya », l’ignorance.
- Le Nirvana (ou Brahman / Atman) : c’est l’Être pur, l’Absolu, cette réalité « absolue » située quelque part au-delà de l’illusion cosmique tissée par la Maya et au-delà de l’expérience humaine conditionnée par le Karman.
- Le Yoga : Il s’agit des moyens pour atteindre l’Absolu, un ensemble de techniques adéquates pour acquérir la délivrance (Moksha).
Toutes les philosophies de l’Inde – y compris le Yoga – visent, non pas la vérité en elle même, mais la délivrance, la conquête de la liberté absolue. La quête de vérité est au service de cette délivrance.
De quoi doit on se libérer ? « S’affranchir » de la souffrance est au coeur de toutes les les mystiques indiennes.
> Le Yoga est issu d’un système de philosophie plurimillénaire, dont le plus ancien est le Veda.
Cette philosophie est un « Darsana », littéralement un « point de vue , une « doctrine », une « philosophie » (ce mot est issu de la racine drc- signifiant « voir, contempler, comprendre »).
Qu’est ce que le Yoga ?
Le terme Yoga désigne toute technique d’ascèse et toute méthode de méditation (Dhyana).
Il vient de la racine yuj- qui signifie « lier ensemble », « tenir serré », « atteler », « joindre », « mettre sous le joug » : le but du Yoga est d’unifier l’esprit, d’abolir la dispersion et les automatismes qui caractérisent la conscience ordinaire (ou profane).
Pour le Yoga, la délivrance ne peut avoir lieu si l’on ne s’est pas d’abord « détaché » du monde. L’accent est donc mis sur l’effort de l’être humain (d’où l’idée de « mettre sous le joug »), sur son autodiscipline.
Ce qui caractérise le Yoga, c’est non seulement son côté pratique, mais aussi sa structure initiatique. On n’apprend pas le Yoga tout seul ! On a besoin d’un maître (Guru). Guidé par son Guru, le Yogin/la Yogini s’apprête à dépasser successivement les comportements et les valeurs propres à la condition humaine. Il y aura donc une mort suivie d’une renaissance, ainsi que la création d’un nouveau « corps » : ce « corps mystique » joue un rôle considérable dans toutes les formes de Yoga, notamment dans le tantrisme et l’alchimie.
Car le Yoga a évolué au fil des siècles et s’est imprégné de différentes influences philosophiques.
> Le Yoga classique est un système de philosophie, codifié par Patanjali dans les Yoga Sutra : ce recueil de 195 aphorismes (Sutra) a probablement été rédigé ou compilé entre 200 av. J.-C. et 500 apr. J.-C. (certains le datent à env. 325 apr. J-C.). Patanjali n’est pas le créateur de la « philosophie » Yoga : il publie et corrige dans son traité les traditions du Yoga connues bien avant lui.
Les Yoga Sutra expliquent ce qu’est le Raja Yoga (Yoga Royal) et précisent notamment les règles éthiques du Yoga : c’est ce que Patanjali nomme l’Ashtanga Yoga, les huit membres ou huit branches du Yoga, comme je l’explique dans mon article.
Patanjali s’inspire de la philosophie du Samkhya, l’un des six systèmes de philosophie orthodoxes de l’Inde. Ces systèmes de philosophie sont :
- la Mimansa,
- le Nyaya,
- le Samkhya,
- le Vaisesika,
- le Vedanta,
- et le Yoga.
Le Samkhya est considéré comme le plus ancien Darsana. Le système métaphysique du Samkhya est dualiste. Les origines du Samkhya sont liées à un problème de nature mystique, à savoir : ce qui subsiste de l’homme après la mort, ce qui constitue le véritable Soi, l’élément immortel de l’être humain.
Il existe une différence entre le Samkhya et le Yoga : le Samkhya est athée, alors que le Yoga postule l’existence d’un Dieu suprême (Ishvara).
Pour ces deux systèmes philosophiques, toutefois, le monde ici bas est rejeté parce qu’il existe autre chose, au-delà du devenir, de la temporalité et de la souffrance.
En somme, la philosophie indienne soutenue par le Yoga rejette le Cosmos et la vie profane parce qu’elle est assoiffée d’un monde et d’un mode d’être sacrés.
Le Vedanta est la dernière école philosophique avant le Yoga. L’Advaïta Vedanta est un courant philosophique peu connu dont le propos est le non dualisme (ou le dépassement de la dualité) : il existe des similitudes entre cette école philosophique et le Yoga, comme je l’explique dans mon article.
– Les liens entre l’Hindouisme et le Bouddhisme :
Comme dans le Bouddhisme, la philosophie du Yoga part du principe que :
« Tout est souffrance pour le sage » (Yoga Sutra, II, 15).
Bien avant l’écriture des Yoga Sutra, le Bouddha avait déclaré :
« Tout est douleur, tout est éphémère » (« Sarvam dukhma, sarvam anityam »).
La source des souffrances sans fins est la solidarité de l’être humain avec un monde dé-sacralisé, de nature profane. Or tout ce qui devient se transforme, se meurt, disparaît, n’appartient pas à la sphère de l’être, c’est à dire : n’est pas sacré. Le chemin vers la liberté conduit nécessairement à une désolidarisation d’avec le Cosmos et la vie profane.
Pourtant, la pensée indienne n’est pas une idéologie nihiliste ni pessimiste. Aucune philosophie indienne ne tombe dans le désespoir.
Car plus l’homme souffre, plus le désir de l’affranchissement monte en lui, plus la soif du salut le travaille. Les illusions se mettent donc au service de l’être humain dont le but suprême est l’affranchissement.
La connaissance suprême, c’est non seulement l’affranchissement de l’ignorance, mais aussi, et même en tout premier lieu, de la souffrance. La révélation de la souffrance est donc la condition sine qua non de l’affranchissement.
Le simple fait d’exister dans le temps, d’avoir une durée, implique en effet une douleur. Mais si la souffrance est universelle, elle n’est pas définitive, puisque chacun peut dépasser sa condition humaine conditionnée par le Karman, et peut annuler ainsi les forces karmiques qui la dirigent.
– Les différentes voies du Yoga traditionnel :
> Elles mettent chacune l’accent sur un aspect particulier du chemin existentiel de la dimension humaine :
- HATHA YOGA : met l’accent sur le corps
- RAJA YOGA : met l’accent sur la méditation
- BHAKTI YOGA : met l’accent sur la dévotion/l’amour
- JNANA YOGA : met l’accent sur la connaissance et l’aspect intellectuel
- KARMA YOGA : met l’accent sur l’action
Sri Aurobindo prône le yoga intégral : pour lui, « tout est yoga », notre Vie est « un Yoga ».
Pour en savoir plus sur la distinction entre le Yoga de la connaissance (Jnana Yoga) et le Yoga de la dévotion (Bhakti Yoga), je vous invite à lire l’article La voie de la connaissance et la voie de la dévotion, écrit par Christophe Guillaume, astrologue de Passion Astrologue.
> Le seul moyen pour le sage de parvenir à la liberté est de se retirer du monde, de s’isoler. C’est par la connaissance au sens métaphysique du terme, que l’homme se dégage des illusions du monde et « se réveille » : la connaissance signifie ici la pratique de la retraite, qui aura pour effet de retrouver son propre centre. La connaissance se transforme ainsi en méditation.
Pour s’affranchir de la souffrance, il existe en effet plusieurs possibilités :
- soit la délivrance s’obtient directement par la connaissance (en suivant l’enseignement du Vedanta ou du Samkhya),
- soit au moyen de techniques, comme le croient le Yoga et la majorité des écoles bouddhistes.
Mais aucune science n’a de valeur si elle ne poursuit pas le « salut » de l’homme.
> C’est pour cela qu’est né le Yoga en proposant différents moyens et techniques au service d’une ascèse libératrice. On voit bien dans un tel contexte l’intérêt immense qu’il représente dans cette quête de vérité visant la transformation et la délivrance ! 😊
Les moyens qu’il met à notre disposition sont contenus dans l’Ashtanga Yoga de Patanjali (« les huit branches du Yoga »). Ils comprennent :
- les 2 principes éthiques Yama et Niyama (Yama : contraintes intérieures – Niyama : contraintes extéreures),
- les Asana (postures et exercices physiques),
- le Pranayama (exercices respiratoires et maîtrise progressive de la respiration),
- le retrait des sens (Pratyahara),
- les exercices de concentration (Dharana)
- et la méditation (Dhyana).
- L’étape ultime – Samadhi – constitue la contemplation parfaite, l’Eveil.
> Il existe d’innombrables autres formes de Yoga populaires, originaux, notamment d’inspiration tantrique ou chamanique.
A partir du VIe siècle apr. J.-C., le Yoga a été enrichi par les Tantrikas, qui ont codifié notamment l’aspect énergétique de l’être humain, comprenant tout le complexe chakrique : les « nadis (« rivières », « canaux) dans lesquels circule l’énergie vitale, et les « chakras », centres – ou « roues » – d’énergie présents dans le corps subtil.
Les écoles tantriques se sont développées entre le VIe et le XIVe siècle apr. J.-C. Elles ont énormément contribué à la diffusion du « Hatha Yoga » que l’on peut traduire de différentes façons :
- Hatha Yoga est l’union (Yoga) du Soleil (Ha) et de la Lune (Tha),
- « Hatha » désigne également la « force », c’est à dire la capacité de ces pratiques à opérer la transformation du corps en un système hermétique, grâce à la stabilisation du souffle , de l’énergie et des fluides corporels, conduits vers le haut par le canal central du corps subtil.
Le Yoga que nous pratiquons aujourd’hui doit donc beaucoup au tantrisme.
Bibliographie :
Yoga, de Mircea Eliade
Yoga Sutra, de Patanjali, traduction de Françoise Mazet
Yoga, l’art de la transformation, de Debra Diamond et David Gordon White
De la vérité, de Jiddu krishnamurtiLes illustrations sont tirées du livre Yoga, l’art de la transformation.
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